jeudi 4 décembre 2014

Extrait 7

Un nouvel extrait :


Et puis, ce fut l’attente, interminable, insoutenable, où chaque bribe d’information devenait une denrée rare, précieuse. Les journaux se montraient optimistes, encensaient le patriotisme et le courage des braves soldats français et critiquaient sans ambages l’incompétence et la cruauté des armées allemandes.
Le 22 août, ils annonçaient la prise de Mulhouse.
« L’Alsace va redevenir française » titraient-ils en gros caractères. Ce qu’ils omettaient de mentionner, c’est que Mulhouse avait dû être évacuée dès le lendemain. Chaque communiqué ne parlait que de victoires, jamais des morts ou des blessés que celles-ci avaient occasionnés.
Tant d’enthousiasme écoeurait Marie. Ce bourrage de crâne lénifiant n’abusait plus personne mais, sans nouvelles du front, elle se raccrochait malgré elle à l’infime espoir que ces feuilles de chou devaient bien contenir une parcelle de vérité.
On s’échangeait les dépêches quand il y en avait. Les plus chanceux lisaient leur courrier à haute voix aux voisins moins fortunés qui n’avaient pas été élus par monsieur Galignon, le préposé aux Postes.
Cet homme, jusque-là ordinaire, était devenu l’homme le plus populaire, le plus convoité du quartier. Celui qu’on guettait derrière le carreau ou que l’on attendait impatiemment sur le pas de la porte. Comme investi d’une mission sacrée, il promenait sa précieuse sacoche de cuir à travers les rues, dispensant joie ou déception, selon le cas. Pour un peu, gonflé de son importance et des généreuses rasades de vin qu’on lui offrait sur son passage, il se serait pris pour Dieu le Père.
Depuis le départ des garçons, Marie n’avait reçu qu’un petit mot d’Adrien, griffonné à la hâte entre deux trains, mais elle était sans nouvelles de Pierre. Chaque jour naissait l’espoir d’une lettre qui s’évanouissait avec la venue du facteur.
– Rien pour vous, madame Bertaud. Désolé, demain peut-être !
Un sourire de circonstance, une main levée à la casquette, et il passait. C’était fini. L’attente reprenait, de plus en plus insupportable, de plus en plus douloureuse. Il fallait patienter, patienter encore. Et les jours succédaient aux jours.
Enfin, au matin du 28 août, la moustache frémissante et l’oeil guilleret, Jules Galignon poussa la porte de l’épicerie en brandissant comme un trophée une lettre où Marie reconnut aussitôt l’écriture hachée de Pierre. C’est à peine si elle ne la lui arracha pas des mains. Indifférente à la présence du postier, toujours à ses côtés, elle déchira fébrilement la fine enveloppe et lut avec avidité les quelques lignes tracées au crayon gris. Enfin, rassurée sur le sort de son fils, elle leva sur l’homme providentiel un regard mouillé de gratitude.
– Il va bien, dit-elle. Il va bien…
Elle répéta la phrase plusieurs fois pour bien se convaincre de la réalité des mots et se laissa tomber,
brusquement, sur un tonneau de sel, les jambes coupées par l’émotion.
– Ben, voyez qu’il fallait pas vous en faire, rétorqua Jules Galignon, habitué à présent à ce genre de manifestation. Il est solide, votre p’tit gars, mais il faut leur laisser le temps de s’organiser.
Puis, voyant qu’elle était trop bouleversée pour penser à lui offrir le verre de vin rituel, il ajouta avec philosophie :
– Allez, bonne journée ma p’tite dame. À la prochaine.
Le carillon de la porte tinta joyeusement, saluant sa sortie. Alors, avec d’infinies précautions, comme si le papier était aussi fragile que du cristal, elle déplia à nouveau la feuille quadrillée et la relut en savourant chaque mot.


mercredi 26 novembre 2014

Retrouvez-moi en dédicaces


Prochaine séances de dédicaces :




Cultura Montauban
Samedi 5 décembre 2014 de 10 h à 18 h

Cultura Portet/ Garonne
 Vendredi 12 décembre 2014 de 10 h à 18 h

Cultura Balma
Samedi 13 décembre 2014 de 10 h à 18 h

Centre Culturel Leclerc Roques
Samedi 20 décembre 2014 de 10 h à 18 h

mardi 21 octobre 2014



Prochaine séance de dédicaces
Samedi 26 octobre 2014

Leclerc Roques






jeudi 16 octobre 2014

Avis d'une lectrice


Un avis qui me touche particulièrement car il émane d'une lectrice, auteur elle-même, dont la plume légère, poétique réjouit le cœur et l'âme.

Cliquez sur le roman pour lire l'avis :






Retrouvez Brigitte Lesigne sur son site : 

Le miroir des mots

lundi 6 octobre 2014

Extrait 6


Un nouvel extrait...


Elle songea soudain avec angoisse que Pierre n’avait que vingt-trois ans, Adrien vingt-sept. Ils seraient les premiers à partir. Les premiers, peut-être, à… Non, elle ne les laisserait pas faire. Cette guerre n’était pas la leur. Si les hommes étaient assez fous pour s’entre-tuer, eh bien, qu’ils le fassent sans eux. Cela ne les concernait pas. Pierre ne partirait pas, Adrien, non plus !
Le carillon du magasin tinta joyeusement, suivi d’une cavalcade dans l’escalier. La voix de Pierre se fit entendre, claire, exaltée :
– Maman, cria-t-il en brandissant le journal à bout de bras. On a tué Jaurès. Cette fois-ci, on n’y coupe pas.
– On va leur mettre une avoinée aux Pruscos ! renchérit Adrien qui arrivait sur ses talons. On va leur faire comprendre une bonne fois pour toutes que…
Il s’arrêta net, brisé dans son élan patriotique par le visage livide de Marie.
– Ben, c’est vrai quoi ! reprit-il décontenancé. On les remet à leur place un bon coup, et on en parle plus.
Sous le regard tranchant qu’elle lui lança, il se sentit, brusquement, redevenir le galopin indiscipliné qu’elle corrigeait d’une calotte.
– Tais-toi, dit-elle d’une voix sourde. Ça vaudra mieux que de dire des bêtises.
Pierre s’approcha doucement et la prit dans ses bras. Il la dépassait d’une bonne tête mais avait gardé, à son égard, les gestes affectueux de son enfance.
– T’inquiète pas, m’man ! souffla-t-il à son oreille. Adrien a une façon un peu crue de dire les choses, mais c’est lui qui a raison. Puisque, maintenant, la guerre est inévitable, autant y aller de bon coeur et en finir rapidement. Plus tôt on réglera le problème, plus vite on sera rentrés.
– Et tes études ? Tu y penses à tes études ? Tu ne vas tout de même pas les abandonner.
L’obstination de sa mère à nier l’évidence le fit sourire.
– J’ai bien peur qu’on ne me laisse pas le choix, maman. Mais, ne t’inquiète pas, je les reprendrai à mon retour. C’est l’affaire de quelques semaines, quelques mois tout au plus… Tu verras, à Noël, tout cela ne sera plus qu’un mauvais souvenir.
Il glissa son index replié sous son menton, comme le faisait Guillaume autrefois, et la força à relever la tête. Elle vit, dans la similitude du geste, un signe de bon augure.
– Je passerai Noël avec toi, je te le promets, fit-il en effleurant sa joue d’un baiser.
Elle essuya furtivement une larme et se remit à touiller la daube pour se donner une contenance. Elle s’en voulait de s’être laissée aller devant les enfants, mais la peur l’amollissait, lui coupait les jambes, explosait dans sa tête en éclats déchirants.
« Seigneur, qu’allons-nous devenir ? » songea-t-elle. Dans un éclair de lucidité elle sut, instinctivement, que cette peur viscérale, animale, qui lui tordait les entrailles, allait devenir sa compagne fidèle, implacable, durant les jours, les semaines, voire les mois à venir.
Derrière elle, les jeunes gens commentaient la nouvelle à voix basse, comme s’ils craignaient de la choquer par leur lyrisme tricolore. Seule Lucie restait silencieuse.
« Elle a compris, elle aussi », pensa Marie. Elle a compris que sa jeunesse, son insouciance allaient partir en même temps que Pierre. Que rien ne serait jamais plus comme avant. Il faut un coeur de femme pour sentir ça. Les hommes, eux, étaient trop prompts à s’enflammer. Même les plus raisonnables trouvaient dans les mots Honneur, Patrie, un prétexte à jeter leur gourme. Ça leur tenait le ventre. Mais, elles, que leur restait-il pour tenir debout dans ce monde pris de folie destructive ?
La voix de Pierre la tira de ses réflexions amères :
– Je raccompagne Lucie chez elle, fit-il en repoussant sa chaise. Je serai de retour avant midi.

Extrait 5


Un nouvel extrait pour vous :


Sa mère arrivait à leur rencontre. Pierre lâcha la main protectrice de Jeanne et se précipita dans sa direction. Le besoin de se faire pardonner lui donnait des ailes. Quand il arriva à sa hauteur, il s’aperçut qu’elle souriait. Allons, tout allait bien ! La disgrâce n’était pas pour aujourd'hui.
Marie regardait Pierre venir à elle.
« Mon fils ! » pensa-t-elle avec une fierté qu’elle ne songeait pas à dissimuler. Comme chaque fois qu’elle posait les yeux sur lui, elle sentit son cœur de mère se gonfler d’orgueil. Du coup, elle en oublia le sermon qu’elle avait préparé et sourit en accélérant le pas.
Dans la lumière poudreuse du couchant, l’enfant courait, ivre de soleil et de grand air, vivante réplique de Guillaume dont il ne connaissait même pas l’existence.
La jeune femme ouvrit les bras, et il s’y jeta, levant vers elle ses yeux couleur émeraude. Elle le serra plus fort, bouleversée par cette ressemblance qui s’accentuait au fil des années. C’était le même sourire, le même éclat tendre et espiègle dans le regard, la même façon de froncer le sourcil quand il était contrarié.
Depuis bientôt cinq ans, elle s’efforçait d’effacer Guillaume de sa mémoire, mais n’y était pas parvenue. Le temps ne lui avait pas accordé la grâce de l’oubli, et son image était toujours aussi vivace. Il ne se passait pas un jour sans qu’un regard, un geste, une parole, n’éveillât en elle un écho douloureux. Les similitudes qu’elle découvrait alors chez son fils ravivaient ses souvenirs que son esprit, réfractaire à toute raison, laissait ressurgir.
Cette ressemblance la mettait à la torture. Pourtant, elle s’en repaissait, en éprouvait une jouissance morbide. Retrouver chez Pierre les traits tant aimés de son amour perdu était une joie et une souffrance de tous les instants.

vendredi 3 octobre 2014

Extrait 4


Pour vous chers lecteurs un nouvel extrait :


Elle reprit connaissance au contact d’une main fraîche et apaisante sur son front. Comment était-elle arrivée dans cette chambre aux murs peints à la chaux, avec pour seul ornement un immense crucifix en bois d’olivier ?
Elle n’eut pas le loisir de poser la question. La douleur, un instant oubliée, revint imprimer sa marque comme un fer chauffé à blanc. Une tenaille géante enserrait ses flancs, lui lasserait les reins, relâchait doucement sa pression pour mieux pousser contre son bas-ventre cette boule de chair chaude et dure qui lui fendait le corps en deux. Un gémissement de bête blessée s’échappa de ses lèvres desséchées. Dans un semi-coma, elle perçut une voix lointaine qui avait du mal à se frayer un chemin jusqu'à sa conscience.
– Dieu merci, la voilà revenue à elle ! Crie, ma belle, si ça te soulage ! Moi, ça ne me gêne pas pour faire mon travail.
Marietta entrouvrit les paupières et découvrit une jeune femme au regard noisette et au sourire rassurant, penchée sur elle. Elle lui bassinait les tempes d’un linge humide à la senteur âcre et vinaigrée, mais dont la fraîcheur était agréable.
Le bien-être éprouvé fut de courte durée. À nouveau, son ventre se tordit, s’enflamma, ondula comme un reptile géant déformé par sa proie. Elle se mordit les lèvres jusqu’au sang pour ne pas hurler.
– Allez, ma belle ! Vas-y, pousse ! Pousse encore, encore ! reprit la voix inconnue.
– Faites ce qu’elle vous dit, encouragea la jeune femme à ses côtés en lui prenant la main. Vous pouvez avoir confiance, Jeanne a mis au monde la presque totalité des enfants du village.
Le ventre en feu, Marietta était prête à suivre toutes les directives, dussent-elles émaner du diable en personne, pourvu que cesse son calvaire. Elle avait l’impression qu’une main de fer fouaillait ses entrailles et que son ventre allait éclater comme un fruit trop mûr, gorgé de soleil.
Elle prit une profonde inspiration et poussa de toutes ses forces, enfonçant ses ongles dans la chair tendre de sa compagne.
– C’est bien ! la complimenta la voix sans visage. Encore un petit effort, tu y es presque… Allez, respire un bon coup et… pousse ! Encore… Encore…
Marietta planait dans un état second. Seuls parvenaient à sa conscience les injonctions et les encouragements de la voix rocailleuse qui la guidait sur le chemin de la délivrance. À sa demande, elle poussait, haletait, respirait, poussait encore, avant de retomber inondée de sueur, le corps rompu par tant d’efforts infructueux.
On allumait les chandelles dans la chambre aux volets clos sur la nuit, quand enfin son ventre meurtri expulsa une petite chose douce et ronde qui poussa un cri vigoureux de protestation.
– Te voilà maman d’un solide gaillard, déclara la voix familière en déposant un petit être chaud et vibrant sur son sein.
Marietta ouvrit les yeux et découvrit, enfin, celle à qui elle devait tant. Une femme au visage rond et jovial, à la chevelure grise ébouriffée lui souriait d’un air complice. Ses yeux bleus, délavés par le temps, la couvaient d’un regard bienveillant.
– Merci, murmura Marietta, épuisée.
– Pas de quoi, ma fille ! répondit la femme. C’est toi qui as fait tout le travail. Je n’ai fait qu’aider un peu la nature, c’est tout ! Repose-toi, maintenant. Tu l’as bien mérité. Ce petit bougre nous a donné du fil à retordre !


lundi 22 septembre 2014

Interview à la librairie Privat


Une vidéo souvenir de l'interview réalisée à la librairie Privat par Sébastien-Philippe Laurens, journaliste à Networkvisio.com, que je remercie chaleureusement pour son remarquable travail.


Dédicaces Librairie Privat à Toulouse le samedi 13 septembre 2014

Un grand merci également à ceux et celles qui sont venus me retrouver et me soutenir lors de cette séance de dédicaces.
Le soleil brillait sur Toulouse ce jour-là et, grâce à vous, il brillait aussi dans mon cœur... 

mercredi 10 septembre 2014

Article Presse

Mon premier article sur La Dépêche du Midi....
La journaliste a pris quelques libertés avec mes propos et mon lieu de résidence puisque j'habite à Toulouse et non dans le Lot :-) mais bon, je ne vais pas lui en tenir rigueur !

Cliquez sur l'article pour le lire :



La dépêche du Midi jeudi 21 août 2014




mardi 22 juillet 2014

Extrait 3

Pour vous un nouvel extrait :


Chapitre 1 (suite)


Marietta s’apprêtait à calmer les esprits quand la porte s’ouvrit violemment sous la poigne vigoureuse de Martin Fontanier et une bouffée d’air glacial s’engouffra avec lui dans la pièce. L’homme s’ébroua, racla ses grosses chaussures pour en éliminer les traces de neige et de boue et retira son chapeau.
Le visage apparut, rougi par le froid avec de grands yeux sombres sous des sourcils épais qui durcissaient un peu les traits sans pour cela en atténuer la beauté. Il se dégageait de sa haute silhouette, dont la taille atteignait six pieds deux pouces, une impression de force et de puissance qui aurait pu en intimider plus d’un. Pourtant, dans le regard qu’il jeta sur ses enfants, on pouvait lire une infinie tendresse et de sa stature imposante émanait une profonde bonté.
– Papa ! s’écria Émilie en se jetant à son cou.
La fillette, charmeuse, s’agrippait aux épaules de son père comme un petit chat sauvage, embrassait ses joues fraîches et râpeuses. Subrepticement, elle glissa à son oreille :
– Tu m’as manqué, tu sais.
Moitié riant, moitié grondant, Martin se libéra des petites mains qui enserraient sa nuque.
– Laisse-moi respirer, petiote. Tu m’étouffes !

vendredi 11 juillet 2014

Extrait 2



Pour vous, chers lecteurs, deuxième extrait de mon roman :


Chapitre 1


Trois ans plus tôt.

Une lueur blafarde filtrait à travers la fente d’un volet disjoint. Hormis le souffle régulier des enfants endormis, nul bruit ne venait troubler le silence de cette matinée hivernale.
Marietta étouffa un bâillement, ouvrit les yeux et les referma aussitôt. Son corps et son cerveau alourdis de sommeil refusaient de lui obéir. Elle se retourna et décida de s’octroyer encore un instant de paresse, pelotonnée jusqu'au cou dans la chaleur douillette de l’édredon. Elle sentait sur ses joues et son front le picotement familier de la fraîcheur matinale et la vivacité de l’air ne l’incitait guère à émerger de sa torpeur.
Le bêlement douloureux de Bichette qui réclamait sa traite la rappela à la réalité. Aussitôt la longue liste des tâches qui l’attendaient s’imposa à son esprit et elle poussa un soupir résigné.
« C’est l’heure », songea-t-elle en repoussant les couvertures.

Extrait 1

Pour vous, chers lecteurs, premier extrait de mon roman :


Prologue


L’homme descend lentement l’escalier. Les épaules sont voûtées, la démarche est lourde comme sont pesants les pas qu’il lui faut accomplir chaque jour depuis presque un mois.
Dans la pénombre de la cuisine qu’éclaire chichement un ciel maussade et pluvieux, il ranime le feu. Ses gestes sont lents, mécaniques, empreints d’une grande lassitude. Il met la cafetière à chauffer, puis actionne la pompe au-dessus de l’évier. Le contact de l’eau froide lui fait du bien, dissipe les miasmes d’une nuit sans sommeil.
Il n’a pas encore remarqué le petit rectangle de papier posé, bien en évidence, au centre de la table. Ce n’est que lorsqu’il s’assoit devant son bol fumant que son œil le détecte.
Son regard s’attarde sur l’écriture familière, mais il ne bouge pas. Une angoisse sourde le pousse à retarder l’instant où il lira ces lignes qui lui sont destinées. Les yeux rivés sur la trame blanche du billet où son nom se détache en lettres majuscules, il avale, gorgée après gorgée, un café qui lui semble de plus en plus amer.
Il sait que, lorsqu’il aura lu, son pressentiment deviendra réalité. Enfin, il se décide, prend une profonde inspiration et saisit le feuillet.
L’écriture est fébrile, l’encre diluée par endroits par des traces de larmes.
Son visage ne laisse rien paraître de l’émotion qui l’étreint, mais ses grandes mains d’homme tremblent tandis qu’il replie lentement le billet et le glisse dans sa poche.
Maintenant, il sait. Son instinct ne l’avait pas trompé. Le temps s’est figé et il reste là, assis, immobile, pétrifié.
Une main timide se pose sur son épaule. Il sursaute.
– C’est toi, petiote ? dit-il sans se retourner. Je ne t’ai pas entendue descendre.
Adeline se penche et dépose un baiser sur sa joue :
– Bonjour, papa. Comment te sens-tu ce matin ? As-tu réussi à dormir ?
Le timbre de sa voix, étrangement haut perché, sonne faux. Dans cette pièce où le silence des absents remplit l’espace, le désarroi de son père n’en paraît que plus palpable. Les sens en alerte, elle entend la respiration rauque et sifflante qui s’échappe péniblement de la poitrine du vieil homme.
Quelque chose ne va pas. Elle le sent, elle le sait dans son cœur et dans sa tête.
Un frisson la parcourt tout entière. Elle tente de se raisonner. Que pourrait-il advenir de pire que le drame qu’ils ont déjà vécu ?
Elle regarde son père dont les épaules s’affaissent à son corps défendant, et une bouffée de tendresse la submerge.
Alors, pour briser ce silence qui nourrit son angoisse grandissante, elle demande d’une voix dont elle force le naturel :
– Sais-tu où est Marie ? Elle n’était plus dans son lit quand je me suis réveillée.
La réponse tarde à venir, puis elle tombe :
– Elle est partie.
– Comment ça, partie ? Partie où ? Pourquoi ?
L’adolescente le fixe. Une expression d’incrédulité fige ses traits, puis la peur s’insinue, dilate ses pupilles. Martin observe le cheminement d’une souffrance identique à la sienne sur ce visage juvénile que la panique déforme peu à peu.
Il voudrait la prendre dans ses bras, la rassurer, mais il ne le peut pas. Sa gorge nouée devient douloureuse sous l’effort qu’il s’impose. Tout son corps lui fait mal.
Incapable de soutenir plus longtemps ce regard qui s’affole d’angoisse inexprimée, il se lève, enfile sa gabardine et marche vers la porte.
– Je ne sais pas, lâche-t-il enfin, d’une voix sourde. Elle est partie, c’est tout !
Maintenant, il a hâte de sortir, de fuir la pièce confinée où sa douleur est à l’étroit. Il éprouve un besoin irrépressible de marcher dans l’air humide de ce printemps pluvieux pour réfléchir à ce qu’il doit faire et, peut-être aussi, pour pleurer sans que sa fille le voie.

mercredi 9 juillet 2014

BIENVENUE SUR MON BLOG

Bonjour à tous,

Bienvenue sur mon blog où j'ai l'immense plaisir de vous accueillir pour vous présenter mon roman :

"Une vie ne suffit pas" 
publié aux Editions 7 écrit.



Ecrire un livre est un bonheur de chaque instant. Créer des personnages, leur donner vie et les voir ensuite évoluer au fil des pages, presque indépendamment de ma volonté, est un véritable émerveillement. C'est le miracle de la vie, de la naissance, sans les douleurs de l'enfantement.


Un livre prend forme dans l'imagination d'un auteur mais c'est entre les mains d'un lecteur qu'il prend vie.

Voilà pourquoi j'ai créé ce blog. 

J'ai connu le plaisir indicible d'écrire, de donner naissance à un roman mais c'est à vous, chers lecteurs, qu'il appartient de lui permettre de grandir et d'exister vraiment.

Alors, n'hésitez pas, contactez-moi ! Donnez-moi votre avis ! J'ai hâte de vous lire et de vous connaître...

A très bientôt. Ici ou lors d'une séance de dédicaces...